Très cher héritage!

Intervenants :

Cédric Rio (Chargé de recherche à l'observatoire des inégalités)
Marion Navarro (Professeur de SES au lycée du parc à Lyon )
Guillaume Allègre (Économiste au Département des études OFCE)
André Masson (Directeur d'Etudes à l'EHESS)
Thomas Piketty (Directeur d'études, EHESS et Professeur à l'Ecole d'économie de Paris)

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Conférence organisée en collaboration avec l'Association Regards Croisés sur l'Economie et l'EHESS

Les inégalités de patrimoine, structurellement plus fortes que les inégalités de revenus, font régulièrement l’objet de débats publics. Vues par certains comme la conséquence légitime de différences dans les comportements de travail et d’épargne, elles sont considérées par d’autres comme à l’origine du développement d’une classe oisive de rentiers. Selon ce second point de vue, les inégalités de patrimoine jouent au détriment de ceux qui travaillent et elles tendent à amplifier les inégalités de revenus. Si les inégalités de patrimoine ont largement diminué au cours du XXème siècle avec la mise en place d’une fiscalité progressive (impôt progressif sur les successions en 1901 et sur le revenu en 1914), elles restent aujourd’hui relativement importantes. En 2004, les 10 % des foyers les plus riches possédaient 46 % du stock total de patrimoine.

Alors qu’au cours du XXème siècle, l’évolution de la fiscalité visait à accroître la redistributivité du système et à réduire des inégalités de revenu et de patrimoine. Les réformes fiscales mises en œuvre depuis une vingtaine d’années en France ont inversé la tendance. L’évolution de la taxation du patrimoine et des revenus du patrimoine est la plus symptomatique de ce retournement. La loi TEPA de 2007 prévoit ainsi une taxation des dividendes au taux forfaitaire de 18 %, une taxation des plus values au taux libératoire de 16 % (contre un taux marginal d’imposition de 40% pour la dernière tranche de l’impôt sur le revenu, principalement issu du travail) et une réduction importante des droits de succession et de donations entre parents et enfants. Avec cette réforme, le nombre de successions exonérées de droits se situe aux alentours de 95 %, seuls les héritages les plus élevés restant imposés. La taxation de l’héritage en France, déjà faible, est à présent réduite comme une peau de chagrin. Pourtant, l'impôt sur les successions devrait contribuer fortement au caractère progressif de la fiscalité française et sa remise en cause risque de renforcer la reproduction sociale. Alors que le patrimoine est peu taxé au cours de la vie d’un individu (principalement via l’ISF pour les plus aisés et la taxe foncière pour les propriétaires immobiliers, ce sont surtout les revenus du patrimoine qui sont taxés au cours de la vie), la taxation de l’héritage apparaît comme un moyen simple de taxer le patrimoine, au moment de sa transmission.

La taxation de l’héritage n’a pourtant pas bonne presse. Certains estiment en effet que le patrimoine ayant été acquis grâce aux revenus du travail et du capital qui ont été taxés, il devrait être exonéré de taxes. Les droits de successions sont vus dans cette optique comme une double taxation injuste. D’un autre côté, on peut considérer que l’héritage induit des différences de richesse entre enfants qui ne reflètent pas des différences dans l’effort qu’ils ont fourni et que l’héritage constitue de ce point de vue une rupture dans l’égalité des chances. Sans parler du cas des grandes fortunes qui se transmettent de générations en générations, créant ainsi une lignée de rentiers. Du point de vue de l’efficacité, l’argument a été avancé qu’une taxation trop lourde de l’héritage découragerait l’accumulation de richesses et inciterait à mettre en œuvre des stratégies d'évasion fiscale. Il semblerait néanmoins que dans les faits ce phénomène soit d’une ampleur modeste.

Que penser de ces débats ? La taxation de l’héritage est-elle justifiée ? Quelle est l’importance de l’héritage dans la dynamique des inégalités ? Pourquoi tant de Français sont-ils opposés à la taxation de l’héritage ? Comment doit-il être taxé ? Comment doit-on penser l’articulation entre taxation du patrimoine au cours de la vie, taxation du patrimoine au moment de sa transmission et taxation des revenus du patrimoine ?

Les quatre intervenants, en abordant chacun un aspect spécifique de la taxation de l’héritage, s’efforceront de faire le tour de ces questions.

Documents liés

- Les inégalités de patrimoine en France, Observatoire des inégalités, Avril 2009

- Les inégalités en héritage, Guillaume Allegre, Lettre de l’OFCE n°284, Mars 2007

- On the Long-Run Evolution of Inheritance : France 1820-2050 Thomas Piketty, Working paper, 126p, septembre 2010

Date :

Mercredi 10 novembre
17:00 - 18:30

Avec le soutien :

Lieu

Salle : Salle Molière
18 Quai de Bondy

69005 Lyon

Accès

<b>Bus </b><br />C3 arrêt Saint-Paul


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